Etres d’argile ou de bronze au hiératisme féminin et parfois érotique, chats sauvages aux longs yeux- presque asiatiques- qu’il s’agit de dompter de nos caresses : le travail de Marie-Thérèse Tsalapatanis ne peut pas laisser indifférent. Face à ces parcelles de délicatesse en mouvement, en mouvance, en attente, le public est interrogé sur ses plus primitifs instincts, on ressent les vibrations d’un retour à la Mère Terre, à la génitrice de tout un Peuple, de toute une Humanité. De ce prosaïsme du quotidien, de cette gestuelle mêlant labeur et infinie pureté, naît une Œuvre puissante, sincère et pleinement vivante qui fait de Marie-Thérèse une Artiste, un être à part mais aussi pleinement conscient de l’Autre. Cette pleine conscience, que l’on pourrait aisément qualifiée d’éthique dans l’œuvre de Tsalapatanis – et qui fait de la Sculpture un objet d’âme – joue d’un contraste entre eros et thanatos. Ces femmes, aux rondeurs mirifiques, à la souveraine sensualité, sont de réels miroirs de nos âmes de simples mortels : elles nous surpassent, nous survivent, nous interrogent dans une maïeutique ancestrale.
La survivance instinctive de ces œuvres d’Art dotées de sentiments, se mêle à une profonde réflexion sur la place de l’Etre ici-bas. Quêter l’équilibre, l’harmonie, le « vivre ensemble », peut-être est-ce là le secret de la genèse de l’Œuvre sculpturale de Marie-Thérèse Tsalapatanis. Les visages émaciés (mais qui ne figurent jamais la déréliction mais bel et bien la « communauté ») ou au contraire d’une rondeur toute maternelle, ne sont pas les seuls à exprimer l’indicible. Ainsi les corps prennent rapidement le relais, sans ostentation aucune, le mouvement saisi à son acmé, est alors figé à jamais dans la matière. Les carnations de lumière, d’ocre ou de bronze revendiquent la Main de la sculptrice, la corporéité sensuelle et féminine du mouvement. Ainsi point d’Eve à la Pomme, ou de féminité famélique sacrifiée sur l’autel de la Misogynie. Tout au contraire, la Sculpture de Tsalapatanis joue d’une opulence presque exotique- plus assurément atemporel- qui fait de l’acte de sculpter, une nécessité revendiquée et presque militante, hommage aux gens de peu, aux clowneries d’un Monde en représentation, dont on tente de sublimer les excès. De cela nait une Magie savante, presque circéenne. Pourtant, les sculptures de Marie-Thérèse Tsalapatanis, ne sont pas ancrées dans la monstration ou le décorum, mais reprennent l’essentiel, explorent le vide pour en exprimer les pleins, esquissent l’abondance pour suggérer les désirs féminins des alcôves.
Amaury Pontvianne